"J’ai découvert ma surdité juste après mon adolescence"

 

Bonjour, je m’appelle Véronique, alias Véro des Sources. J’ai 42 ans. Je suis mariée et j’ai deux enfants, Céline 10 ans et Nicolas 6 ans. J’habite un village au sud d’AMIENS.
J’ai découvert ma surdité juste après mon adolescence. Elle est probablement d'origine génétique. J’étais au lycée et j’avais de grosses difficultés à prendre mes cours. A cette époque là, je n’osais pas à parler à mes parents, car ils  eux-mêmes ne m’en parlaient pas. Quand je tentais d’en parler, ils me disaient que je me trompais et que je n’avais aucun problème auditif. Je suis allée jusqu’au BAC sans le décrocher à cause de ma surdité. C’est là que je me suis inscrite à l’école de secrétariat médico-social, car j’avais réussi le concours d’entrée. C’était un peu absurde de ma part, car bien sûr, je ne pouvais pas prendre de note, notamment à la sténorette, et encore moins répondre au téléphone. Ce fut deux années de galère, au bout desquelles je n’ai pas décroché le diplôme. J’ai ensuite bifurqué vers la petite enfance. J’ai également réussi mon concours d’entrée à l’école d’éducateur de jeunes enfants à PARIS. J’ai suivi les cours pendant deux ans. Là, je devais obtenir mon diplôme en raison de mes résultats, il m’a été refusé de me l’attribuer en raison de mon problème de surdité, qui n’était pas compatible avec les jeunes enfants. Après tant d’échec, j’ai abandonné les études. N’étant pas diplômé et n’ayant aucun travail, je ne pouvais être autonome. Je suis donc retournée vivre chez mes parents. J’ai stagné pendant presque dix années, car mes parents et particulièrement ma mère, me confinait à la maison, de honte pour moi, car elle savait que je souffrais de ce problème, sans pouvoir m’aider et préférait donc me cacher. Elle a tenté quelques petites choses, mais sans conviction et donc sans parvenir à m’extérioriser. J’étais à l’époque énormément complexée.
J’ai donc rencontré mon mari, Serge, qui a été patient et persévérant pour me changer. Ce ne fut pas facile et il a fallu plusieurs années. Au début, rien que d’évoquer ma surdité, cela me faisait fondre en larmes. Avec le recul, je constate qu’il a insisté pour mon bien, mais aussi pour celui de notre couple et de nos enfants. En effet, la surdité peut être un danger pour un couple. Il m’arrivait de mal comprendre une conversation et d’inverser complètement le sens de celle-ci. Lorsque c’est occasionnel, cela passe encore, mais lorsqu’on est malentendant profond comme je le suis, c’est quasiment quotidiennement que les conflits éclataient à cause de conversation mal comprise. C’est aussi pour cela que je témoigne, car c’est très important que les maris soutiennent leur femme. Je tiens d’ailleurs à les encourager à le faire davantage (pour certains, tout au moins).
Mon complexe de surdité était tel, que je ne voulais plus sortir ou presque. J’avais perdu confiance en moi. Un premier grand virage pour moi, ce fut quand j’ai repris le travail. Ce ne fut pas facile, car le monde du travail avait changé. Par contre, il restait quelque chose qui n’avait pas changé depuis toutes ses années, c’était que la surdité était encore tabou. Au lieu que mes collègues me rassurent, elles mettaient à l’index ma surdité. Là encore, le soutien de mon mari fut important. J’ai fini mon contrat et rapidement je me suis mise à la recherche d’un autre travail. Très rapidement, car j’étais décidée à me réinsérer dans le monde du travail, j’ai retrouvé un emploi. En ce lieu, j’ai trouvé de nombreuses personnes compréhensives.
En fin d’année 2003, je suis touchée par une crise d’acouphènes intenses qui m’ont fait chuter énormément le peu d’audition qu’il me restait. A ce moment là, j’étais à 94 % de perte auditive. J’ai donc pris rendez-vous chez mon ORL, un homme formidable, le docteur LARNIER François. En raison de l’aggravation de mon audition, il a évoqué le fait que je pouvais devenir complètement sourde, dans un avenir plus ou moins proche. Il a donc évoqué l’hypothèse de l’implant cochléaire, car les aides auditives que je portais n’étaient plus suffisantes. Il m’a parlé du Professeur MEYER de l’hôpital St Antoine, en me disant qu’il était le meilleur (et c’est bien vrai). Le soir même, à la maison, je fis des recherches sur Internet où je découvris les nombreux témoignages sur le site du CISIC. Pendant plusieurs, je lisais et relisais les témoignages de manière à bien tout comprendre. Je n’avais qu’une envie c’était de me faire implanter. Il restait une angoisse pour moi, étais-je implantable. Le docteur LARNIER pris rendez-vous pour moi. Le mercredi 14 janvier 2004, je rencontre pour la première fois le docteur Claude FUGAIN et le Professeur Bernard MEYER, ainsi que Catherine DAOUD, la présidente du CISIC. C’était angoissant car je ne savais pas si j’allais les convaincre de ma motivation et surtout si je pouvais bénéficier de l’opération. Après plusieurs entretiens, je rencontre enfin le Professeur MEYER qui me dit que c’est OK. Tout c’est passé très vite et l’opération a été programmée pour le 24 février 2004.
Je me présente donc le 23 février 2004 à 16 heures. On m’explique les formalités et on me présente ma chambre. J’étais sereine. Contrairement à mon tempérament anxieux, je ne m’inquiétais de rien. J’étais convaincu à l’idée de repartir avec quelque chose de positif. Je suis opérée le mardi 24 février  2004, en début de matinée. Je regagne ma chambre vers 13 heures. L’opération s’est bien passée. Je n’ai eu aucun signe de nausée ou de vomissement. J’avais quand même des maux de tête sans que cela ne soit insupportable. J’avais un joli casque bleu qui me comprimait la tête. C’est ce qui fut pour le plus inconfortable. Le mercredi matin, on me retire mon casque. (Quel soulagement). Malheureusement, je commence à avoir des démangeaisons au niveau du visage. Ceci n’a rien à voir avec l’opération, mais simplement dû à une allergie à un produit hospitalier. Le soir même, le Professeur MEYER me fait sortir d’urgence en raison de cette allergie. Heureusement, que je n’avais pas d’effet indésirable consécutif à l’opération (nausée, vertige et vomissement). Je suis contrainte à revenir tous les jours à l’hôpital St Antoine, en visite, pour suivre l’évolution de la cicatrisation. Le vendredi 27 février 2004, le Professeur MEYER m’autorise à rentrer chez moi pour le week-end pour revoir mes enfants, car comme vous le devinez bien, mon mari était à mes côtés. Le mercredi 03 mars 2004 on me retire mes 22 agrafes. Je n’ai quasiment rien senti. Ce n’était franchement pas douloureux. On me demande de me reposer le jeudi 04 mars afin de me présenter le vendredi 05 mars 2004 à ma première stimulation. C’est Claude FUGAIN qui est chargée de celle-ci. J’appréhende ce moment crucial qui a changé ma vie. En effet, ce jour là, au bout de quelques minutes, j’entends derrière les bips une voix qui me parle. Je réalise alors que c’est la voix du docteur FUGAIN a qui je parviens avec l’aide de la lecture labiale à lui répondre. Pensant que je portais encore mon contour, me demande de l’ôter. Je lui fais remarquer qu’il est posé sur la table. Elle décide alors de me dire des mots de légumes que je dois répéter, et ce, sans lecture labiale bien sûr. Comme par magie, je parviens à lui restituer 5 mots sur 8. C’est extraordinaire et émouvant. Même avec l’aide de la lecture labiale, je ne comprenais pas tout et là, même les yeux fermés, j’entendais et surtout je comprenais. Pour répondre à certaines interrogations, il est vrai que le son n’était pas net au début. J’entendais des bips et derrière des mots, d’une voix métallique. Malgré cette stimulation positive, je repars sans l’implant. Il s’agit du Nucléus Esprit 3G. Le lundi 8 mars 2004, commençait ma première rééducation. Ce fut moins évident que je le pensais. Très rapidement, nous avons attaqué les petites phrases simples. Le résultat était pour moi décevant. Pourtant Claude FUGAIN me disait de ne pas m’inquiéter et que j’obtiendrai avec le temps de bons résultats. J’étais logée sur PARIS par un ami, ce qui m’a permis de bénéficier de 4 à 5 séances par semaine. Je suis passée par la suite à des phrases plus compliquées pour suivre par des textes de lecture enfantine et enfin terminer par la lecture de revues. Il faut être patient et persévérant, car j’ai eu des moments de doutes. Notamment quand au début je rentrais chez moi et ne parvenais pas à comprendre mon mari et reconnaître la voix de mes enfants. A la fin de cette rééducation, je suis arrivée à un bon résultat, car j’arrivais à comprendre plus de la moitié des conversations.

img_0200.jpgAujourd’hui presque six mois après ce merveilleux évènement, je comprends quasiment toutes les conversations. Je dis quasiment toutes les conversations, car il y a des voix plus difficiles que d’autres à assimiler. Il me reste encore à progresser, mais je n’ai aucun doute d’y parvenir.
Les premières choses qui m’ont surprises, c’est la cacophonie de la circulation parisienne. En contre partie, le week-end quand je rentrais dans ma campagne, c’était le bonheur d’entendre le chant des oiseaux. D’ailleurs, je n’entendais que ça. En fait, comme il y avait des années que je ne les avais plus entendu, dès que j’en entendais un, c’était merveilleux. Aujourd’hui, ce l’est encore. J’entends le téléphone sonner, le cliquetis du clavier de l’ordinateur et bien d’autres petites choses que les entendants n’y prête même plus attention.
Je souhaite que les gens qui ont l’opportunité de se faire implanter, de le faire, car c’est vraiment merveilleux d’entendre à nouveau.
Je remercie le Professeur Bernard MEYER pour son grand professionnalisme. Je remercie également le Docteur Claude FUGAIN pour sa patience et son soutien et surtout pour les moments privilégiés que j’ai passé avec elle et que je n’oublierai jamais. Je remercie aussi Catherine DAOUD pour sa disponibilité et son charisme.
Je tiens aussi à remercier l’ensemble des personnels soignant et non soignant qui entoure le Professeur MEYER et le docteur FUGAIN et particulièrement Dominique Anne FONTAINE.
Je remercie vivement le docteur LARNIER, mon ORL pour son dévouement.
Et merci à vous Marie-Pierre et Yannou qui m’ont soutenu dans les moments difficiles.
Enfin, je remercie également et surtout, mon mari d'avoir été toujours à mes cotés et de m'avoir beaucoup aidé dans les moments difficiles , que j'ai pu rencontrer.


Véronique alias Véro des Sources, implantée le 24.02.2004 par le Professeur MEYER à St Antoine (PARIS).